Savoir résumer

Préparer et rédiger le résumé

I. La phase de préparation : la lecture et l'étude du texte

  1. une première lecture, globale, pour comprendre le texte

  2. une seconde lecture pour : souligner les mots-clés ; encadrer/marquer les mots-outils (mots/expressions qui marquent les liaisons et les transitions) ; comprendre l'organisation du texte (l'unité de pensée = le paragraphe)

II. La rédaction du résumé doit satisfaire à trois exigences : être clair, être fidèle, être bref

  • A - Être clair : par la propriété des termes et l'organisation des idées / par la construction de paragraphes ayant leur unité propre / par l'élimination de tout ce qui est purement anecdotique

    → Faut-il pour autant supprimer les exemples ?

    • En général, on ne retient pas les exemples qui n'ont qu'une valeur illustrative (sauf s'ils sont indispensables pour éclairer l'acception d'un terme abstrait).

    • Pour les exemples représentatifs d'une idée essentielle, dont la généralisation aura valeur de preuve, il convient d' en garder au moins un, le plus significatif

  • B - Être fidèle : éviter toutes les déformations du sens réel du texte / s'abstenir rigoureusement de tout commentaire personnel

    Principes à respecter : objectivité + caractère impersonnel du résumé (éviter des indications telles que "Dans ce texte, l'auteur déclare ..., montre que ..., comme le pense Diderot..., selon Valéry ...", etc.)

    → Peut-on faire des citations ?

    • L'objectif de l'exercice de résumé est de rendre la pensée d'autrui avec ses mots à soi. Il ne faut cependant pas être obsédé par ce souci jusqu'à l'absurde. S'il s'agit d'un texte de science, d'art, de droit, etc., il est évident que les termes techniques sont irremplaçables. Il n'est pas interdit de reprendre un mot ou un expression caractéristique, voire un membre de phrase ou une formule célèbre, mais on les mettra entre guillemets.

  • C- Être bref: pour respecter la règle ou norme du genre / chercher à la fois la précision et la concision (l'art d'exprimer le maximum avec le minimum de mots) / éviter des phrases trop longues (qui font perdre le fil au lecteur) et trop courtes (qui liassent l'impression d'un texte haché).

ExempleEssai sur l'amitié

§1 Notre monde ne considère pas l'amitié sous un angle moral. Nous pensons plutôt l'amitié comme un sorte de convivialité plaisante. Nous confondons le copain ou le camarade avec l'ami,ou nous prenons pour acquises des relations de fait, celles qui doivent se nouer entre des gens qui sont soumis aux mêmes règles dans une institution. Il est ainsi significatif que nous privilégions le mot sympathie, dont l'étymologie désigne, comme dans compassion, une communauté de sentiments. En se manifestant au-delà des limites du moi et de ses intérêts, la sympathie nous rend bien sûr l'autre plus proche. Elle déclôt l'individualité et l'ouvre à une région plus vaste, à tout ce qui vit, à tout ce qui est sensible, nous dit Bergson. Mais la sympathie n'est pas l'amitié, qui est davantage, car la relation qu'elle désigne est réciproque et ne doit rien aux accidents qui nous placent ici plutôt que là parmi des êtres que nous n'avons pas choisis. Cette contingence nous permettra de déterminer des degrés dans l'amitié.

§2 On pourra d'abord évoquer une amitié plaisante, celle dans laquelle ce qui est aimé, c'est l'agréable. Cette amitié est celle que nouent ceux qui recherchent ensemble les mêmes plaisirs. L'ami est celui qui a les mêmes jeux, les mêmes loisirs, celui dont la compagnie est agréable et festive. Cette forme d'amitié suit le principe d'Empédocle, qui veut que les semblables s'attirent, car ce qui rapproche les personnes dans ce cas, c'est une communauté de goûts. C'est l'amitié privilégiée de la jeunesse en général. Mais l'agrément est cause très instable et fragile : le plaisir change au gré des circonstances et de la maturité de chacun. Ainsi cette amitié est accidentelle, comme est accidentelle sa cause. Elle peut se nouer et se dénouer au gré des circonstances.

§3 Appelons ensuite amitié utile, celle dans laquelle ce qui est aimé, c'est l'utilité. Cette amitié se rencontre chez ceux qui ont une relation fondée sur le service mutuel. L'ami est celui qui me rend service en m'apportant ce qui m'est utile et auquel je rends service dans le même sens. Ici l'amitié est gouvernée par le principe d'Héraclite selon lequel les contraires tendent à s'unir : ce que je n'ai pas, l'autre le possède et, inversement, je possède ce dont il a besoin, de sorte que nous avons besoin l'un de l'autre. On constate par exemple que s'installent des relations entre des gens très différents par nature, mais dont les différences sont justement complémentaires, et qui s'apprécient pour cette raison. Or nos besoins sont relatifs aux circonstances. Aussi une telle amitié va-t-elle se dissoudre dès que l'utilité ne sera plus ressentie. L'amitié utile est une relation accidentelle parce que ce n'est pas la personne qui est aimée, mais seulement ce que l'on attend d'elle.

§4 Enfin, appelons amitié parfaite, ou amitié vertueuse, celle dans laquelle l'ami est celui à qui je veux du bien et qui me veut du bien. Cette dimension morale est très importante. On ne peut pas appeler ami celui qui vous encouragerait à la dépravation pour vous faire plaisir (celui qui offre de l'alcool à l'alcoolique, de la drogue au drogué). L'ami est celui qui a souci de votre bien et qui saura parfois vous remettre en question pour vous sortir de votre égarement. En outre, cette attention n'est pas, comme précédemment, accidentelle. Persévérer dans le bien, c'est affirmer sa propre nature. L'amitié parfaite n'est pas une amitié d'un jour, et cette durée est celle de notre propre nature, pour autant qu'elle est portée vers le bien. On peut donc concevoir une amitié utile ou une amitié plaisante entre une crapule et un homme de bien, entre deux hommes vicieux, mais il est inconcevable d'y rencontrer une amitié parfaite. La connivence dans le mal rend impossible la plus haute forme d'amitié qui est aussi la plus naturelle.

§5 Pourtant, il faut avouer qu'une telle amitié est rare. Nous sommes le plus souvent motivés par le plaisir et l'utilité. L'amitié est vertu et non passion. La sympathie peut s'éprouver passivement, l'amitié se veut, elle s'entretient. Il est facile de souhaiter une telle amitié, plus délicat de l'entretenir, même si elle ne suppose pas l'ascétisme et englobe les deux amitiés précédentes : de vrais amis pourront naturellement se rendre service et chercheront les mêmes plaisirs. Kant ajoute qu'il y a dans l'amitié un équilibre si fragile qu'il relève pour ainsi dire d'un Idéal où doivent se concilier le respect et l'amour. Les hommes sont tiraillés entre ces deux extrêmes : ou bien un respect purement formel, comme celui que l'on a à l'égard de ses collègues, ou bien un attachement passionnel, mais qui est réservé aux proches dans le cadre de la famille.

§6 Ceci ne laisse donc guère de place à l'amitié. Elle la retrouverait si nous obéissions à des valeurs différentes que celles qui ont cours aujourd'hui. Nos modèles sociaux favorisent la relation passionnelle (dans le cinéma), une certaine complicité virile (autour du sport), une convivialité superficielle (autour du jeu et de la fête). Comment, dans le harcèlement dans lequel nous vivons, pourrions-nous être sensibles à la formule d'Épicure : « Du pain, de l'eau et de l'amitié » ? L'amitié paraît bien un Idéal : ce vers quoi nous voudrions tendre, mais que nous ne parvenons pas à atteindre.

Méthode

  1. Après une première lecture, identifier les caractéristiques essentielles du texte : discours philosophique ; discours argumentatif ; présence du "je" et du "nous" ; utilisation d'un vocabulaire abstrait (termes philosophiques : contingence, ascétisme, etc.)

  2. Après une seconde lecture, repérer et formuler la thèse soutenue : Les amitiés fondées sur le plaisir et l'utilité sont périssables; seule l'amitié fondée réciproquement sur le bien réalise durablement notre nature, mais c'est aujourd'hui un idéal inaccessible.

  3. Comprendre le plan-mouvement du texte (la progression des idées, la connexion des unités, la présence de termes-clés). Ce plan peut prendre la forme d'un tableau de structure qui permet de faire le tri entre essentiel et accessoire :

Le paragraphe et sa structure

Arguments et mots-clés

Exemples

§ 1

Connexions logiques (organisation du discours argumentatif) :

Ainsi : valeur illustrative

Bien sûr - mais : relation concessive

L’essentiel : [Amitié > Sympathie - MAIS]

-Confusions entre ami et copain

-Nous privilégions le mot sympathie

- La sympathie nous ouvre à l'autre, mais l'amitié est réciproque et ne doit rien au hasard.

Bergson

§ 2

D'abord : annonce le premier « degré d'amitié »

Mais : opposition

Ainsi : conséquence

L’essentiel : [D'abord - Mais (donc)]

[D'abord] L'amitié plaisante réunit les êtres selon leurs affinités.

[Mais] Le plaisir est relatif et transitoire.

[Donc] Cette amitié est accidentelle et se dénoue au gré des circonstances.

/

§ 3

Ensuite : introduit le deuxième type d'amitié

Or : cause

Aussi : conséquence

L’essentiel : [Ensuite - Or >Aussi (=Mais)]

|Ensuite] L'amitié utile est bâtie sur le service mutuel.

[Or] Nos besoins sont relatifs aux circonstances.

[Donc] Cette amitié va se dissoudre avec l'utilité.

On constate par exemple ... des relations entre des gens différents par nature ....

§ 4

Enfin : introduit le dernier type d'amitié

En outre : ajoute un argument (trait distinctif) supplémentaire

Donc : conséquence

Mais : opposition

L’essentiel : [Enfin - en outre]

[Enfin] L'amitié parfaite repose sur le souci réciproque du bien de l'autre.

[En outre /et] Ce souci est durable car conforme à notre nature.

(Mais) L'amitié parfaite exclut la connivence dans le mal.

On ne peut pas appeler ami celui qui ...

§ 5

Pourtant : concession

L’essentiel : [Pourtant (+ justification)]

[Pourtant] Rareté de l'amitié parfaite

-L'amitié est une vertu exigeante où doivent se concilier le respect et l'amour.

Kant

§ 6

Donc : conclusion

[Donc/ ainsi] Nos valeurs sociales nous éloignent de l'amitié, qui reste un idéal inaccessible.

cinéma, sport, fête

formule d'Épicure

Proposition de résumé :

Les trois amitiés

L'amitié n'est plus pour nous qu'un sentiment galvaudé, souvent confondu avec la sympathie : celle-ci marque bien une ouverture à l'autre, mais l'amitié vraie est réciproque et sa nécessité la distingue des autres « degrés » d'amitié.

Une première forme d'amitié est bâtie sur le plaisir de nouer des liens avec qui nous ressemble. Mais le plaisir est relatif est variable, ce qui la rend éphémère.

Une autre forme d'amitié repose sur l'utilité des services que les amis se rendent de façon complémentaire : mais nos besoins sont transitoires, et cette amitié disparaît avec eux.

L'amitié vertueuse enfin repose sur le souci réciproque du bien de l'autre, et cette attention, durable comme notre nature, exclut le vice.

Pourtant cette amitié reste aujourd'hui exceptionnelle car, sans être toujours austère, elle exige que s'y manifestent à la fois le respect et l'amour.

Invitant aux loisirs ou aux passions, notre société nous éloigne ainsi de cet idéal.

ComplémentQuelques observations sur les réductions effectuées

§1 : La relation concessive bien sûr - mais a été exprimée dans une seule phrase :

Celle-ci marque bien une ouverture à l'autre, mais l'amitié vraie ...

§2: La conséquence (Ainsi) est exprimée par une relative, ce qui permet ici encore de réduire à une seule phrase :

Ainsi cette amitié est accidentelle ... Elle peut se nouer et se dénouer ...

..., ce qui la rend éphémère.

§3 : La conséquence (Aussi) est ici rendue par la conjonction de coordination et :

mais nos besoins sont transitoires, et cette amitié disparaît avec eux.

§4 : L'addition (En outre) apparaît sous la forme d'un groupe apposé :

En outre, cette amitié .../ ... et cette durée est celle de notre propre nature

... et cette attention, durable comme notre nature, ...

§5 : La concessive introduite par Même si est traduite par sans + infinitif :

même si elle ne suppose pas l'ascétisme ...

... sans être toujours austère ...

§6 : Contraction du fragment "Nos modèles sociaux favorisent la relation passionnelle (dans le cinéma), une certaine complicité virile (autour du sport), une convivialité superficielle (autour du jeu et de la fête)" dans un participe présent (+ compléments) :

Invitant aux loisirs ou aux passions, notre société ...