Imparfait et passé simple
Les formes de l'imparfait |
---|
Fondamental :
Quel que soit le verbe et quel que soit le groupe, l'imparfait de l'indicatif est toujours marqué de la même façon :
pour les 3 personnes du singulier et la 3ème personne du pluriel, on intercale ai avant la marque de personne
pour la 1ère et la 2ème personne du pluriel, on intercale i avant la marque de personne
Par ailleurs, la présence du ai ou du ions/iez a pour effet secondaire la réalisation systématique de la consonne latente[1] de la base quand consonne latente il y a : les consonnes latentes se réalisant toujours devant voyelle, elles se réalisent donc notamment devant les voyelles de l'imparfait.
BASE | Imparfait | PERSONNE | |
je tu elle | chant écriV parT finiSS | ai ai ai | s s t |
nous vous | i i | ons ez | |
ils | ai | ent |
Les formes du passé simple |
---|
Fondamental : La voyelle
La particularité du passé simple (particularité qu'il partage avec le participe passé[2]) est d'utiliser une voyelle qui est différente selon le verbe :
a pour elle chanta | i pour elle écrivit | u pour il voulut | in pour elle vint |
A cette difficulté cependant s'en ajoute une autre, qui est que la voyelle en question se place selon les cas à différents endroits :
|
Fondamental : La personne
Une fois que vous avez la bonne voyelle au bon endroit, il reste à marquer la personne : là tout est régulier ... avec une seule difficulté au 1er groupe et pour le verbe aller. Comme toujours, ces deux cas posent problème... parce que la voyelle qui est utilisée est la voyelle a qui complique toujours le marquage des personnes.[3]
BASE | passé simple | PERSONNE | |
je tu elle | écriV vouL v | i u in | s s t |
nous vous | ^mes ^tes | ||
ils | rent |
Pour les verbes du 1er groupe et pour le verbe aller en revanche, on a les marques suivantes :
j' | écout all | ai | |
tu elle nous vous | a | s 0 ^mes ^tes | |
elles | è | rent |
Remarque :
On comprend dès lors que la morphologie du passé simple paraisse difficile. Le problème n'est pas tant le caractère un peu désuet des marques de personne au pluriel (on se fait bien à ces chantâmes et fîtes, dans sommes, êtes et faites). Le problème réside dans le choix de la voyelle, qui ne répond pas à des règles, et qu'il faut mémoriser pour chaque verbe, ou du moins chaque groupe de verbe.
A noter cependant que le participe passé[4] pose exactement le même type de problème (d'où les difficultés des enfants essayant un *[5]j'ai prendu), et que tout adulte use du participe passé sans difficulté. Il n'y a rien là donc d'insurmontable.
Le problème du passé simple tient seulement au fait qu'il est réservé à des usages que notre civilisation de l'écrit a perdu à l'oral : il est plus difficile là de se fier à son intuition.
Méthode : Trouver la bonne forme pour le passé simple
Il y a pourtant un moyen très efficace pour trouver la voyelle demandée. Car le passé simple est beaucoup plus utilisé qu'on ne le dit, y compris à l'oral : il est notamment très présent dans le quotidien des enfants et de ceux qui les fréquentent, via la pratique des contes - contes de fées ou autres, où une histoire fictive est racontée venue des temps immémoriaux.
Certes les enfants s'emmêlent entre ces a, i, u et autres in. Mais au moins, ils l'emploient : il ne viendrait à l'esprit de personne, et surtout pas d'un enfant, de raconter La Belle au Bois Dormant au passé composé. Essayez, vous verrez : il n'y a plus de conte.
Cela nous donne le test cherché, infaillible pour quiconque a fréquenté ou fréquente encore cette littérature des contes de fée :
Pour être certain d'avoir la bonne forme pour le passé simple d'un verbe, refermez vos tables de conjugaison, faites une phrase. Il faut se placer dans le contexte d'un conte et compléter l'amorce suivante :
|
Éventuellement vous testez plusieurs possibilités pour mieux comparer "à l'oreille" :
Que préférez-vous ? Sauf si nous n'avez aucun lien avec l'univers de l'enfance en français, vous constatez là que vous savez bien laquelle entre morda, mordit et mordut est la bonne forme. |
Tel est le test à utiliser systématiquement lorsque vous voulez trouver quelle est la forme du passé simple pour un verbe en particulier |
---|
Valeurs et emplois |
---|
Fondamental : Les valeurs de l'imparfait
L'imparfait renvoie souvent à des faits dans le passé qui durent :
Il écoutait.
notamment à des processus en cours :
Il faisait la vaisselle.
à des processus inachevés, voire à de pures velléités :
Il partait quand on l'a appelé.
à des habitudes passées :
Il allait à la piscine le dimanche.
à des propriétés s'appliquant à une situation passée :
Il était charmant.
Mais il a beaucoup d'autres valeurs :
S'il écoutait, il comprendrait. Valeur d'hypothèse donnée comme contraire aux faits.
Je voulais vous demander de m'aider. Valeur de politesse.
Trois jours plus tard, il mourait. Valeur de rupture[7] où il renvoie à un fait ponctuel.
Et le passé simple aussi peut renvoyer à des faits qui durent :
Il écouta pendant trois heures.
La valeur propre de l'imparfait serait donc plutôt :
- de ne pas être compatible avec une limitation explicite, notamment avec celle que marque "pendant trois heures" : - de marquer non pas nécessairement que quelque chose a lieu, mais que quelque chose est donné comme vrai par rapport à une autre situation où ce serait faux :
|
Cela explique une autre de ses valeurs remarquables qui est d'être le temps utilisé dans les discours rapportés au passé :
Elle a expliqué qu'elle allait au cinéma : il n'est pas dit là qu'elle est allée au cinéma, que cela a eu lieu, mais seulement qu'elle l'a dit, et donc qu'elle l'a donné comme étant vrai.
Fondamental : Les valeurs du passé simple
Le passé simple renvoie généralement à des actions passées (ou fictives) sinon ponctuelles :
Il entra.
du moins limitées :
Il écouta pendant trois heures.
qui sont envisagées globalement :
Elle voyagea : tout le voyage est résumé, depuis son début jusqu'à son achèvement (comparez avec Elle voyageait où le voyage est saisi dans son cours)
et qui sont menées jusqu'à leur terme :
Il fit la vaisselle = on en conclut que la vaisselle est faite (comparez avec il faisait la vaisselle, où rien ne garantit qu'"il" ira au bout de cette vaisselle)
Il arrive cependant qu'il marque le commencement d'un processus :
A ce moment-là il neigea = il se mit à neiger.
Dans tous les cas, le propre du passé simple est de marquer l'avènement d'un changement dans la continuité du temps.
Dans tous les cas,le passé simple s'emploie dans le récit d'événements qui sont donnés comme indépendants du locuteur qui les raconte :
A ce titre, il est donc caractéristique d'une littérature de fiction, où les événements s'enchaînent dans une succession souvent perçue comme causale : avec le passé simple, les protagonistes de l'histoire sont aux commandes des événements qu'ils déclenchent, et le narrateur ne fait que rapporter ce qui est advenu. |
Problème d'orthographe : ai ou ais |
---|
Attention : Le problème d'orthographe entre imparfait et passé simple : 1ère personne 1er groupe
Comme on le voit dans les tableaux ci-dessus, pour le verbe aller et pour le 1er groupe, le passé simple et l'imparfait sont homophones[9] (ou quasi-homophones[10]) à la 1ère personne du singulier :
je chantai | je chantais |
j'allai | j'allais |
Aux autres personnes en revanche, les terminaisons sont nettement distinctes :
tu chantas il chanta nous chantâmes vous chantâtes ils chantèrent | tu chantais il chantait nous chantions vous chantiez ils chantaient |
Et pour les autres verbes aussi, les terminaisons sont distinctes :
je partis | je partais |
Il s'agit donc d'un problème bien circonscrit : il ne concerne que le 1er groupe et le verbe aller.
Méthode : Test
Pour trancher entre passé simple et imparfait face à une 1ère personne du singulier du verbe aller ou de verbes du 1er groupe, la méthode la plus simple et la plus efficace consiste à :
Remplacer dans la phrase le verbe par un autre verbe hors 1er groupe et essayer les deux temps : → si l'un des deux temps paraît malvenu ou exclu, on le note en faisant précéder la phrase rejetée d'un astérisque *[5], → et on choisit la terminaison de l'autre temps pour le verbe de départ. |
OU |
Remplacer dans la phrase la 1ère personne par une autre personne - plutôt une 3ème personne du singulier pour laquelle on a souvent plus d'intuition comme on l'a vu - et essayer les deux temps : → si l'un des deux temps paraît malvenu ou exclu, on le note en faisant précéder la phrase rejetée d'un astérisque *, → et on choisit la terminaison de l'autre temps pour la 1ère personne dans la phrase de départ. |
On peut aussi s'interroger sur les valeurs exprimées par les verbes dans les phrases considérées, pour voir si ces valeurs relèvent plutôt d'un passé simple ou d'un imparfait mais on a vu que ces valeurs sont assez subtiles pour ne pas être forcément simples à identifier, et on a vu entre autres qu'elles sont nombreuses pour l'imparfait.
Mieux vaut se fier à son intuition de la langue et utiliser les tests ci-dessus. |
L'intuition que l'on a sur l'emploi de ces temps dans des phrases particulières est en effet beaucoup plus sure et beaucoup plus subtile que tout ce que l'on serait capable de formuler à l'aide de descriptions plus ou moins maladroites des valeurs en jeu.