
« Bellaud » par Bellaud — gallica.bnf.fr. Sous licence Domaine public via Wikimedia Commons.
La vie de Louis Bellaud de la Bellaudière demeure en grande partie mystérieuse. Né à Grasse, probablement en 1543, il a connu la vie militaire. Contraint, après la Saint-Barthélémy, de regagner Aix où il avait été étudiant, il est retenu plus d’un an et demi dans la prison de Moulins. Revenu à Aix, il fait partie de la cour d’Henri, bâtard d’Angoulême, gouverneur de Provence, ce qui ne l’empêche pas de connaître encore la geôle à deux reprises. De ces séjours en prison dont nous ignorons la cause, témoignent Obros et rimos et Le Don-don infernal, tandis que Lous Passatemps évoque sa vie aixoise.
Sa maîtrise de l’art du sonnet et du style pétrarquiste lui permet de ménager des effets de surprise et de concilier lyrisme, humour et fantaisie.
Traduction
Bon an, bon mois, bon jour, ma douce Colombette,
bonne heure, bon matin, toujours vous donne Dieu ;
quand vous ne ferez rien, au moins pensez à moi,
qui par trop vous aimer peut-être perdrai l’âme.
Ah si je vous tenais seulette dans un bois,
autre mal, par ma foi, belle, ne vous ferais-je
que de cueillir des fleurs à pleines mains,
les jetant à l’entour de votre personne.
Et puis, en vous baisant, je vous dirais :
« Jeanneton, comme lard dans la poêle mon cœur se fond,
laissons passer ici la chaleur de Titan. »
Vous verrez que les oiseaux qui savent mon tourment,
en chantant vous diront : « Sus, fille, promptement,
de grâce contentez Louis de la Bellaudière. »
Version normalisée
Bòn an, bòn mes, bòn jorn, ma doça Colombeta,
bòna ora, bòn matin, tostemps vos done Dieu,
quand vos non faretz rèn, au mens pensatz a ieu
que pèr trop vos amar, bensai rendrai l’armeta.
E! que si vos teniáu dedins un bòsc soleta,
autre mau, pèr ma fe, bèla non vos fariáu,
sinon qu’a plenas mans, de flors ieu culhiriáu,
las getant a l’entorn de vòstra personeta.
Et puèis en vos baisant, vos diriáu : « Janeton,
coma lard en sartan si fond mon coraçon,
laissem passar aicí la calor titaniera. »
Veiretz que los aucèus que sabon mon torment
en cantant vous diràn : « Sus, filha, prèstament,
de gràcia contentatz Loís de la Belaudiera. »
Version originale
Bon an, bon mez, bon jourt (ma dousso Coulombeto)
Bon’ houro, bon matin, tous-tens vous doune Diou,
Quand vous non farez ren, aumengs penssas à you,
Que per trop vous amar, bessai rendray l’armetto.
Hé ! que si vous teniou dedins un bouosc soulletto,
Autre mau, per ma fé, bello non vous fariou,
Sinon qu’à plenos mans, de flours you cuillariou,
Las gitant à l’entour de vouostro persounetto.
Et puis en vous baisant, vous diriou : (Janeton,
Coumo lard en sartan s’y fond mon couraçon,
Laissen passar eicy la calour titaniero.
Veirez que lous ausseaux que sabon mon tourment,
En cantant vous diran : (Sus, fillo) prestament,
De gracy contentas, Louïs de la Bellaudiero.
Bellaud de la Bellaudière – L’œuvre
- 1595 : Obros et rimos provenssalos. L’édition originale suivie de l’étude d’Auguste Brun, Marseille, Mascaron, 1595, est reproduite par Laffitte Reprints, Marseille, 1974. Cet ouvrage contient en fac-similé les trois recueils du poète.
- 2013 : Édition critique des Obros et Rimos (Sonnets et autres rimes de la prison), Sylvan Chabaud, PULM, Montpellier, collection « Estudis Occitans » : http://www.pulm.fr/index.php/louis-bellaud-de-la-bellaudire.html
Bellaud de la Bellaudière – Bibliographie secondaire
- 1988 : Georges Gibelin, Lire Bellaud. Cahier des Alpes-Maritimes n° 4, Ville de Grasse/ Conseil Général des Alpes-Maritimes.
- 1993 : Louis Bellaud de la Bellaudière. Actes du colloque de Grasse (8-9 octobre 1988) réunis par Georges Gibelin, Montpellier, SFAIEO, 1993.
- 2014 : Dossier « Bellaud », revue Tenso, Bulletin of the Société Guilhem IX, vol. 29, n°s 1-2, Louisville, Kentucky.
- 2015 : En ligne sur le site du CIRDOC, journées d’étude CAPES/Jornadas d’estudis CAPES 2015, Montpellier, Université Paul Valéry, Occitanica – Mediatèca Enciclopedica Occitana / Médiathèque encyclopédique occitane, http://www.purl.org/occitanica/11019